Westwing - Point valeur du mois d'octobre
Westwing est une société de commerce en ligne opérant sur un modèle de ventes privées. Le site marchand éponyme commercialise essentiellement des objets de décorations, du mobilier, ainsi que d’autres accessoires liés à l’univers de la maison.
Un concept inédit
Il s’agit d’un modèle assez particulier qui s’apparente à un club de shopping privé avec des offres thématiques qui se renouvellent quotidiennement. La société devrait réaliser pas loin de €440m de chiffre d’affaires en 2020 et capitalise €540m avec environ €100m de trésorerie nette au bilan.
Les 1,3 millions de clients actifs de la société reçoivent tous les matins par e-mail ainsi que sur l’application des offres compilant une sélection d’objets. Ces derniers sont présentés dans le cadre d’une vente spécifique autour d’une thématique donnée. Pour donner un aperçu, on a pu voir passer des ventes autour du style de décoration flamand, de tapis berbères, de tables de banquet, de cuisines automnales, où d’objets néo-baroques. La sélection dure habituellement quelques jours. En complément des ventes thématiques, certaines ventes privées peuvent mettre en avant une marque en particulier.
Le mix produit reste au final assez diversifié et porté sur les accessoires ; 10% cuisine, 23% linge de maison, 20% décoration, 23% meubles volumineux, 7% petits meubles, 10% luminaires. La moitié du chiffre d’affaires est réalisée en zone germanophone (Allemagne, Autriche, Suisse), le reste de l’activité est réalisé dans le reste de l’Europe (Belgique, République Tchèque, France, Italie, Pays-Bas, Pologne, Espagne, Slovaquie).
A la différence d’un site marchand classique, le modèle dispose d’un volet inspirationnel très poussé avec un contenu éditorial soigneusement mis en valeur.Le but ultime est de digitaliser l’expérience d’un catalogue ou d’un magazine de décoration. La co-fondatrice Delia Fischer a d’ailleurs débuté sa carrière en tant qu’éditrice chez Elle Décoration. On devine dès lors que la clientèle est essentiellement féminine (90%!). Le taux d’attachement au concept est très élevé : 80% du chiffre d’affaires est réalisé avec des clientes qui visitent le site plus de 100 fois par an.
Westwing et Amiral Gestion, une histoire en trois temps :
La découverte pré-IPO. Étant actionnaires de l’incubateur Rocket Internet, nous suivions indirectement le développement de Westwing qui faisait partie du portefeuille. Nous nous retenons néanmoins de participer à l’IPO fin 2018 pour des raisons de valorisation, ainsi que par manque de conviction à l’époque sur la réplicabilité du succès en zone germanophone aux autres pays d’Europe
La multiplication des déceptions post-IPO. La société a enchaîné trois avertissements sur résultats liés à une croissance plus faible qu’attendue notamment sur la partie non-germanophone. Le management a dû restructurer une partie de ce périmètre, en particulier en Italie où il fallait opérer un repositionnement global de la marque. La déception du marché est ultime. Le cours tombe sous les €2, moins d’un an après une introduction en bourse à €26 !
Les premiers achats depuis septembre 2019. Nous entamons alors la constitution d’une ligne. A l’époque la valorisation évoluait autour de la trésorerie nette. Il était possible d’acheter la société pour l’équivalent des liquidités à la banque ! Le marché n’accordait aucune valeur à l’activité sous-jacente après les multiples désillusions. Néanmoins, tout en reconnaissant les problèmes conjoncturels que traversait la société, la consommation de trésorerie restait très limitée sur la base d’une structure de coûts fixes stabilisée. A ce prix nous pouvons donc sereinement attendre un retour progressif de la croissance suite au repositionnement de l’activité.
La demande liée au Covid a permis une forte matérialisation du levier opérationnel.
La première vague du virus en Europe s’est accompagnée d’une hausse du temps passé à domicile avec les mesures de distanciation sociale instaurées. La fermeture de la plupart des boutiques a clairement bénéficié aux acteurs du commerce en ligne. Du fait de son positionnement centré sur la maison, Westwing en est ressorti comme grand vainqueur.
Alors que la société avait du mal à embarquer de nouveaux clients sur les 5 premiers trimestres entre sa cotation en bourse et la période du Covid-19 (base de nouveaux clients à +6% seulement sur la période), Westwing a pu faire progresser sa base de clients de 30% et afficher plus de 90% de croissance de chiffre d’affaires au 2ème trimestre. Les deux tiers de l’activité sur ce trimestre ont été réalisés avec des clients actifs de l’année dernière qui ont augmenté leur fréquence d’achats.
Par conséquent, la société qui faisait péniblement 0% d’Ebitda a publié une marge au second trimestre à 13.5% ! A marge brute quasi stable, on a pu voir se matérialiser un levier opérationnel significatif sur les coûts fixes (essentiellement frais généraux + partie fixe des frais logistiques). Etant donné que la valorisation était au niveau de la trésorerie nette, nous avons assisté à une revalorisation boursière assez violente. Le cours de bourse a été multiplié par 10 depuis fin mars.
Cette situation spéciale a surtout pu montrer que la marge cible EBITDA de 10% à maturité était tout à fait réaliste avec suffisamment d’échelle, dissipant ainsi la plupart des doutes sur la pérennité du modèle économique. Malgré cette forte hausse, la valorisation à 0.9x le chiffre d’affaires de l’année prochaine reste inférieure au ratio d’introduction à 1.5x. L’histoire boursière a certes très mal débuté pour Westwing, mais au final, le fort rattrapage de l’activité qui se poursuit sur cette fin d’année permet finalement à la société de recoller à ses prévisions d’IPO. westwingnow